Mesnard Ludovic"A force d'en parler, je me suis décidé à l'automne à m'inscrire au marathon de Paris en même temps que ma gazelle. Le plus dur pour moi est alors de trouver le temps de me préparer sérieusement. J'ai toujours plus ou moins couru - je jouais milieu de terrain défensif au foot - mais jamais au-dessus du semi-marathon (sur la Pomme à Neuvy-Saint-Sépulchre ou à Chateauroux) et mes séances de footing dépassent rarement l'heure. Avant d'entamer un cycle de 10 semaines de préparation à compter de la mi-janvier, je m'oblige dès le 9 décembre à une sortie de 18 km en ville chaque week-end. Dès la mi-janvier, "j'essaie" de suivre le programme "Objectif 3 h 30 à la sensation" trouvé dans un numéro spécial de Jogging international. Je me soumets tous les mercredis... ou presque à une séance de 30 mn au seuil. Les semaines passent (notamment une séance de 1 h 45 seul en forêt qui m'a paru interminable) et les premiers tests grandeur nature se présentent : semi de Vierzon 1 h 39 (en finissant bien), 4 semaines avant Paris, et la semaine suivante semi de Châteauroux 1 h 34 (le mors aux dents dans les 5 derniers km). J'ai de bonnes sensations, mais toujours la même inquiétude : est-ce que je tiendrais la distance ? J'enchaîne, deux semaines avant le jour J, avec une séance de 2 heures (2 h 30 étaient prévues) un samedi matin et 45 mn sur le 10 km de la Villaréenne, l'après-midi. Toujours pas convaincu que je tiendrai la distance... Dix jours avant, plus d'envie, je zappe quelques séances et je m'aligne sur le 11 km du Tour de l'étang de Saint-Août où je me sens pousser des ailes. De superbes sensations - je remets du gaz à la demande - et un classement dans le Top 15 étonnant ! Dernière semaine, je surveille mes repas : pâtes ou riz à tous les étages et gâteau Fenioux en fin de semaine. Je me suis inscrit dans le sas des 3 h 15, histoire de ne pas être dans la cohue, mais mon objectif est de réaliser entre 3 h 30 et 3 h 50. Je dors étonnamment bien avant l'évènement. Je fais un très bon repas équilibré la veille. Je me sens bien, même si ma crainte de la distance et de devoir affronter le fameux mûr n'est pas dissipée. J'ai ma "cartouchière" Fenioux autour de la taille avec des gels à prendre au départ, puis aux 10e, 20e, 30e, 35e et 38e kilomètre. Il y a beaucoup de monde au départ sur les Champs-Elysées - des athlètes venus du monde entier - et le soleil, même si le fond de l'air est frais. On entend un coup de pistolet, mais il nous faudra patienter 4-5 bonnes minutes avant d'avancer. Je passe la ligne de départ 6 minutes après le départ officiel. Je déclenche mon chrono sur la ligne. Les premiers hectomètres sur les Champs-Elysées donnent la cadence et je suis étonné de ne pas être finalement gêné devant le record de participants (40 000). Il y a beaucoup du monde sur et autour du macadam après la Concorde, rue de Rivoli. Je déroule sur les 5 premiers kilomètres (4 mn 56, 4 mn 50, 4 mn 41, 4 mn 44, 4 mn 36). Je suis un peu en avance sur mon temps de passage au 5e kilomètre (23 mn 47 au lieu de 25 mn pour boucler les 42,195 en 3 h 30 soit à 12 km/h). Pas de souci particulier jusqu'à la mi-course, même si je commence dès le 19e kilomètre à avoir hâte d'être dans la deuxième moitié du parcours. Pas bon signe. Je passe le semi en 1 h 44 et quelques secondes, pile poil dans l'objectif des 3 h 30, avant d'aborder les quais au pied de Notre-Dame et les fameux "tunnels" redoutés des coureurs. 26e kilomètre, je commence à sentir une douleur derrière la cuisse qui monte jusqu'à me provoquer une crampe m'obligeant à marcher. J'atteins le 27e kilomètre, sur la voie Georges Pompidou, 9 mn 32 plus tard ! Les kilomètres suivants devant la Tour Eiffel et Porte d'Auteuil sont (déjà) plus pénibles - d'autant que ma partenaire a mis le clignotant au 30e ce qui ne me remonte pas le moral - avec des crampes récurrentes près des genoux : 5 mn 07, 5 mn 12, 5 mn 26, 5 mn 28, 5 mn 46, 6 mn 01, 6 mn 21, 6 mn 50, 7 mn 01. Le nez sur le mur ! Dès lors, les sept derniers kilomètres s'avèreront particulièrement pénibles entre crampes, marche et course lente : 52 minutes pour franchir la ligne. Je remets du carburant (gels Fenioux) avant l'heure (34 et 37e kilomètres), mais rien n'y fait : la distribution est défaillante, le moteur HS. Je ne suis pas le seul dans ce cas dans le bois de Boulogne où les naufragés se comptent par dizaines, se tirant les crampes, s'allongeant, titubant. Un spectacle apocalyptique et il reste encore deux bornes !!! Je me fais doubler par une coureuse qui pourrait être ma grand-mère... Les spectateurs m'encouragent dans le dernier kilomètre à ne pas me résigner, mais la douleur (crampes généralisées aux deux jambes, bientôt sous la voute plantaire) m'empêchera de finir avec "dignité". Je passe quand même la ligne avenue Foch en courant avec l'Arc de Triomphe en toile de fond. 3 h 58. Un chrono aussi mémorable que laborieux. Le mal aux jambes est tenace après la ligne, il le sera encore davantage à J + 2 et J + 3, haro sur les descentes d'escaliers ! Bilan : moyennement satisfait du temps, content d'avoir quand même terminé mon premier marathon. Je ressors de cette expérience avec encore plus de respect pour cette épreuve mythique et ces athlètes allant  au bout de leurs capacités physiques. Je ne parle pas ici des Kenyans qui ont fait le tour en un peu plus de deux heures, à peine essouflés ! Diététiquement, j'étais au point avant et pendant la course (j'ai bu à tous les ravitaillements), ma préparation athlétique était par contre, comme prévu, nettement insuffisante pour profiter pleinement de cette magnifique traversée de Paris".